Future chaufferie au bois : « Green washing » à la saint-germanoise
Lorsque la question a été débattue en conseil municipal le 7 juin 2012, elle était loin d’être nouvelle. En travail de commission, pour classer les offres reçues pour cette délégation de service public, nous avions déjà attiré l’attention des élus sur la quantité de bois consommée par cette chaufferie - 10 000 tonnes mentionnées en commission - et la difficulté de prétendre trouver un approvisionnement local.
En effet, la future chaufferie, qui verra le jour en 2014 derrière le nouveau cimetière, consommera une quantité de bois-énergie supérieure à ce que produit la forêt de Saint-Germain. Bien entendu il ne s’agit pas d’utiliser des parties nobles pour les brûler dans la chaufferie : seule une petite partie du bois est utilisée pour cet usage. Dans ces conditions, même en incluant la forêt de Marly, il est clair que l’apport local, aussi souhaitable soit-il, ne peut être que marginal.
Malgré ces alertes exprimées en commission, la majorité municipale de Saint-Germain a présenté en conseil municipal un contrat dont l’article 16 prétend garantir « 4000 tonnes de bois ayant pour origine la forêt de Saint-Germain-en-Laye » et 5000 tonnes dans un rayon qui inclut également la forêt de Marly :
Ces prétentions étaient évidemment surprenantes, et un coup de fil s’imposait à l’ONF pour vérifier cette information. Nous n’étions pas au bout de nos surprises :
- La mairie de Saint-Germain n’avait pas contacté l’ONF pour analyser les offres des entreprises candidates !
- La société Dalkia, qui a été retenue pour cette délégation de service public, a approché l’ONF pour se procurer du bois-énergie à destination de la future chaufferie de Saint-Germain
- La quantité de bois destiné à la chaufferie susceptible de venir de la forêt de Saint-Germain serait voisine de 10% du besoin
La vidéo ci-dessous montre notre présentation prudente de ces informations lors du conseil municipal du 7 juin 2012, tant il nous paraissait invraisemblable que la mairie de Saint-Germain n’aie pas contacté l’ONF en parallèle de sa négociation avec Dalkia. C’est pourtant ce qui ressort clairement des échanges qui ont suivi notre intervention :
Le maire comme l’adjoint en charge du dossier ont simplement fait confiance au futur délégataire. Faire confiance, pourquoi pas, mais pas à une entreprise avec laquelle on négocie : chacun sait qu’une situation de négociation est peu propice à la plus grande sincérité.
Quelques mois plus tard, un sympathisant nous a fait parvenir une information intéressante. Lors de sa présentation annuelle du 16 décembre 2012, à laquelle assistait le maire de Saint-Germain, l’ONF a montré le transparent suivant :
1000 tonnes de bois par an, c’est bien en-dessous des 4000 tonnes contractuelles !
Contacté à ce sujet, le maire de Saint-Germain campe sur sa position : si Dalkia l’a promis, alors c’est vrai !
Appréciez la langue de bois ! Voilà une source d’approvisionnement local inépuisable...
Soyons clairs : l’offre de Dalkia était, lors de l’étude en commission, une des deux meilleures sinon la meilleure. Nous ne critiquons pas le choix de Dalkia. Nous critiquons l’affichage écologique de la mairie de Saint-Germain au-delà de ce qui est réaliste et l’absence de vérification des propositions du délégataire.
Cet épisode, pas dramatique mais peu glorieux pour la majorité municipale UMP, montre une fois de plus que les décideurs de Saint-Germain n’écoutent pas les alertes de leur opposition, même après des précédents prémonitoires comme la dette du Sidru ou le risque des bandes cyclables mal conçues, et privilégient dans leurs choix les critères financiers et fiscaux aux critères environnementaux. Une chaufferie au bois, cela coûte moins cher actuellement, et cela fait bien. Peu importe la réalité de son fonctionnement.
En l’occurrence il faut relativiser la vertu écologique de cet investissement, d’une part parce que le bois fera peut-être des centaines de kilomètres en camion pour être acheminé (le contrat ne prévoit aucune préférence pour un approvisionnement proche, en dehors des objectifs irréalistes énoncés ci-dessus), et d’autre part parce que le futur « écoquartier » de la Grande Ceinture, s’il avait été vraiment respectueux de l’environnement, aurait été conçu en habitat passif, qui produit autant d'énergie qu'il en consomme. A titre d’exemple, après un premier immeuble à Meudon, Bouygues construit actuellement des bureaux à énergie positive à Rueil-Malmaison : ce type de performance n’est plus du tout révolutionnaire. Plus un bâtiment est grand, plus son isolation est facile et plus réduit est le surcoût de la performance énergétique.
Quant à la chaufferie, nous veillerons au moins à ce que la ville fasse jouer la clause de pénalité de l’article 77 du contrat et perçoive effectivement les 45 000 € par an pour manquement à l’approvisionnement local défini à l’article 16… Nous avions également recommandé que cette formulation des pénalités soit revue pour inciter le délégataire à utiliser autant que possible du bois-énergie local.
Une pénalité progressive serait préférable au tout ou rien du contrat présenté en conseil. Si seulement le quart de l’objectif de 4000 tonnes est atteint, alors le délégataire paierait une pénalité qui serait moindre que si le bois avait en totalité une origine lointaine.
Pour en savoir plus :